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L’Occident, ivre de pouvoir, se rapproche de plus en plus du bord de l’abîme

Mohamed Lamine KABA, août 15

L'Occident, ivre de pouvoir

La chute du mur de Berlin en 1989 et l’illusion de la fin de la guerre froide 1991 ont marqué un tournant dans l’histoire mondiale, entraînant une période d’hégémonie occidentale caractérisée par l’ivresse de la puissance. Cette période d’hégémonie occidentale a été caractérisée par une série d’interventions militaires, l’imposition de la démocratie libérale et du capitalisme tous azimuts, et une emprise accrue sur l’économie mondiale. Cependant, cette dominance a également entraîné un déficit de légitimité et des tensions géopolitiques croissantes, mettant en évidence les limites et les contradictions de cette ivresse de la puissance. 

Contexte historique 

L’ivresse de la puissance de l’Occident depuis l’illusion de la fin de la guerre froide est marquée par la fin de la bipolarité et l’émergence des États-Unis comme seule superpuissance mondiale. La dissolution de l’Union soviétique a entraîné une période de réorganisation géopolitique, avec la création de nouvelles institutions et la redéfinition des alliances. La globalisation et la libéralisation économique, que l’on est convenu d’appeler, en d’autres termes, l’occidentalisation du monde, ont également joué un rôle clé, entraînant une intégration accrue des économies et des marchés. La propagation de la démocratie libérale et des valeurs occidentales a accompagné cette période, tandis que les révolutions technologiques ont transformé les moyens de communication, de transport et de production, influençant les relations internationales. Ce contexte a créé un environnement propice à l’ivresse de la puissance de l’Occident, caractérisée par une confiance excessive dans sa capacité à modeler le monde selon ses intérêts et ses valeurs.

Implications géopolitique et géostratégique internationales

Les implications géopolitiques et géostratégiques internationales de l’ivresse de la puissance de l’Occident sont multiples et complexes. D’abord la domination occidentale a entraîné une résistance croissante de la part de puissances émergentes, qui cherchent à défendre leurs intérêts et à contester l’ordre établi. Cela a conduit à un renforcement de la rivalité entre puissances et à une instabilité régionale, notamment au Moyen-Orient et en Afrique. Le printemps arabe et la montée en puissance des mouvements terroristes ainsi que la multiplication des foyers de tension en Afrique illustrent mieux cette thèse. La montée du nationalisme et du protectionnisme est également une conséquence de l’hégémonie occidentale, car certains pays cherchent à protéger leurs intérêts économiques et culturels. Par ailleurs, l’ivresse de la puissance de l’Occident a entraîné un déficit de légitimité, car ses actions sont souvent perçues comme néocoloniales ou impérialistes. Tout cela pourrait entraîner une réorganisation de l’ordre mondial, avec l’émergence de nouveaux acteurs et de nouvelles alliances. A la pointe de cette réorganisation, les pays de l’Alliance BRICS qui partagent le fait de subir, différemment bien sûr, le diktat, donc la domination du monde occidental. Déjà sur la sellette de l’histoire, l’effritement de l’Occident est évident, d’autant plus qu’il se trouve déjà au bord du précipice.

Impacts économique, culturel et sécuritaire mondiaux

L’ivresse de la puissance de l’Occident, il faut le dire sans hésitation, a eu des impacts dramatiques sur l’économie, la culture et la sécurité mondiales. Sur le plan économique, la domination occidentale a entraîné une globalisation qui a profité uniquement aux pays occidentaux, exacerbant les inégalités entre les nations et au sein des sociétés non-occidentales. Les pays en développement ont toujours été contraints d’adopter des politiques économiques néolibérales qui ont favorisé les intérêts des entreprises occidentales au détriment de leur propre développement. Sur le plan culturel, l’hégémonie occidentale a entraîné une homogénéisation culturelle, avec la diffusion de valeurs, de normes et de pratiques occidentales qui ont éclipsé les cultures locales. Cela a suscité des réactions de résistance et de rejet, notamment dans les pays musulmans et autres en Afrique, en Asie et en Amérique Latine. Sur le plan sécuritaire, la domination occidentale a entraîné une instabilité croissante, avec des interventions militaires et des ingérences politiques qui ont exacerbé les conflits et créé de nouveaux risques. La prétendue « guerre contre la terreur », qui s’est substituée à la semence de la terreur à travers le monde, a également entraîné une surveillance et une répression accrues, qui ont érodé les libertés individuelles et les droits de l’homme.

À la lumière de ce qui précède, nous pouvons déduire que l’ivresse de la puissance de l’Occident depuis la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989 et l’illusions de la fin de la guerre froide 1991, a généré des conséquences dramatiquement profondes et durables sur le monde. Elle a entraîné une hégémonie qui a exacerbé les inégalités, provoqué des résistances et des conflits, et érodé les libertés et les droits de l’homme. Il est essentiel de reconnaître les limites et les dangers de cette hégémonie et de transiter vers un ordre mondial multipolaire plus équitable, plus démocratique et plus pacifique. Cela nécessite une remise en question des présupposés et des intérêts qui sous-tendent la puissance occidentale, ainsi qu’une volonté de dialoguer et de coopérer avec les autres acteurs mondiaux pour construire un avenir plus juste et plus sûr pour tous. C’est ce d’ailleurs que l’Alliance BRICS propose.

On peut donc dire que, par son ivresse de la puissance, l’Occident est responsable des maux dont souffre l’humanité depuis belle lurette.

 

Mohamed Lamine KABA, Expert en géopolitique de la gouvernance et de l’intégration régionale, Institut de la gouvernance, des sciences humaines et sociales, Université panafricaine, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »

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