21.06.2023 Auteur: Vladimir Terehov

La forme mosaïque des relations sino-européennes

Les relations entre la Chine et l’Europe se présentent sous la forme d’une mosaïque sophistiquée. Principalement en raison de la présence significative en eux de la somme des facteurs définis par le mot caoutchouc “politique”. Parmi lesquels, notons tout d’abord un facteur aussi important que la préservation de l’influence dominante des États-Unis sur tout ce qui se passe sur le continent. Malgré le déplacement de plus en plus évident vers la région Indo-Pacifique des principaux intérêts de Washington, qui a son propre jeu avec Pékin, qui est loin de coïncider complètement avec celui de l’Europe.

Mais il est également difficile de parler de ce dernier avec une grande précision en raison des obscurités avec la catégorie “Europe” elle-même. Les principaux prétendants à un rôle représentatif en son nom sont de hauts fonctionnaires de l’UE. Mais la procédure d’occupation de tous les postes bureaucratiques de l’UE, sans exception, par des personnes concrètes a un rapport très indirect avec l’expression démocratique de la volonté des peuples d’Europe. Puisque ces personnes sont à l’origine appelées à accomplir la volonté de l’élite transatlantique (qui évite la publicité). L’un de ses emplacements est situé dans le “marais de Washington“, que D. Trump n’a pas réussi à “assécher“. Nous lui souhaitons du succès dans cette “deuxième approche”. Pour le bien de son pays et de la grande majorité de l’humanité.

Si, cependant, on descend du niveau des structures transeuropéennes aux “étages“ inférieurs,  “les désaccords et l’hésitation“ sont également observées ici. On parle du « régionalisme » dans l’image politique européenne de la Russie depuis plus d’une décennie. Mais ces dernières années, il y a des signes de sérieuses différences dans les approches pour résoudre divers types de problèmes qui existe entre les pays européens. Ainsi qu’ à l’intérieur de presque chacun d’entre eux.

Auparavant, les manifestations de tels désaccords étaient examinées dans NEO en relation avec le problème du positionnement de plus en plus compétitif dans le monde dans son ensemble et sur le continent européen, en particulier, deux (sur les trois principaux) États toujours de la même région Indo-Pacifique, qui aujourd’hui sont la RPC et le Japon. Depuis, de nouveaux détails ont apparus qui permettent de revenir sur le sujet de la “mosaïque“ des relations sino-européennes actuelles.

Tout d’abord, notons de nouveau l’importance croissante et de plus en plus évidente pour les deux parties non seulement de maintenir leur niveau actuel, mais aussi de poursuivre leur développement. Cependant, alors que de la part de Pékin dans la politique dans le sens européen s’exprime la volonté de retenir bien cette tendance, la “pression“ de Washington se reflète de plus en plus clairement dans la contre-politique des Européens.

L’illustration d’un article sur ce sujet dans le Global Times chinois exprime une vision souhaitable du positionnement de l’Europe plutôt que l’état d’affaires réel dans ses relations avec les Etats-Unis. Bien qu’on constate (sur l’exemple de la société Amundi, l’un des leaders mondiaux de la gestion d’actifs) l’aspiration des entreprises européennes juste au développement de la coopération économique avec la RPC.

Mais sur le chemin d’un tel scénario de transformation des relations bilatérales, une barrière est déjà clairement marquée sous la forme de la même “politique“. Lors de la réunion du 12 mai à Stockholm des chefs des ministères des Affaires étrangères des Etats membres de l’UE, il a été décidé de soutenir la politique de la direction de cette alliance « visant à réduire la dépendance de la Chine ».

Comme l’a dit le chef de la politique extérieure de l’UE, J. Borrell, nous parlons pour le moment de plusieurs technologies « clé », par exemple, des fournitures de panneaux pour les centrales solaires, ainsi que des métaux des terres rares. Dans le même temps, la volonté de la “dissociation“ économique de la RPC (decoupling, terme apparu aux États-Unis en 2020 à propos de la politique dans le sens chinois) est niée.

Mais ici (et ce n’est pas pour la première fois dans de pareils événements) des voyous baltes se sont annoncés, qui s’étaient auparavant démontrés de manière la plus négative dans le problème de Taiwan. Il s’agit du chef du ministère lituanien des affaires étrangères, qui a déclaré que l’UE dans son ensemble devait se préparer à une telle perspective.

Cependant, les fonctionnaires européens ont apparemment estimé que ce serait « trop », c’est pour cela, pour le moment, ils se sont limités à peu près au message suivant adressé à la RPC : « Les gars chinois, nous nous « déconnectons » un tout petit peu. Pour que le patron ne soit pas trop en colère. Il est bien sévère. Ne soyez pas donc trop vexés. »

Toutefois, des parallèles avec ce qui a été observé ces dernières années dans les relations de l’UE avec la Russie s’imposent. Tout a commencé par une série progressive de « sanctions » et s’est terminé (de facto, par une balle dans son propre pied) « par la réduction des risques liés à la dépendance de l’approvisionnement en gaz russe ». C’est ce que le petit bourgeois européen paie, dont les problèmes ne semblent absolument pas préoccuper les dirigeants européens actuels.

Mais, bien sûr, pas tous les dirigeants partagent cet avis. Au moins en raison de la nature électorale persistante du processus même de maintien au pouvoir de certaines groupes élitaires dans les pays européens. C’est aussi pourquoi il est difficile de ne pas remarquer les différences de positionnement des différents pays européens sur la scène internationale en général et par rapport à la Chine (et à la Russie) en particulier.

A cet égard, la plus rigide de tous les Européens est la position du Royaume-Uni, qui est aussi absolument contre-productive. Ce qui est bien illustré dans Global Times. De la liste des actions anti-chinoises les plus récentes entreprises par Londres, notons la proposition de l’ancienne Première ministre Elizabeth Truss (pour rappel, initiée lors de son séjour à Taïwan) de créer une « OTAN économique » .

Le fait que ce n’est pas la propre initiative de l’ancien haut fonctionnaire du Royaume-Uni déjà en retraite  est attesté par la signature de l’actuel gouvernement britannique dans le cadre de la soi-disant « Déclaration des Six ». Il s’agit d’un document paru le 9 juin intitulé Joint Declaration Against Trade-Related Economic Coercition and Non-Market Policies and Practices, signé par l’Australie, le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni (le seul pays européen (?)) et les États-Unis. Entre autres, ce document est également intéressant en ce qu’il introduit un nouveau mème (après le decoupling) « coercition économique » (economic coercion), qui est maintenant proposé pour déterminer la politique de la Chine. Bien que la RPC elle-même ne soit pas directement mentionnée dans ladite « Déclaration ».

Londres continue de se préoccuper de la situation à Hong Kong, sur laquelle a été publiée fin mai une autre revue, paraissant tous les six mois (Foreign Office n’en finit pas de dépenser de l’argent pour l’entretien des fonctionnaires concernés), au sujet de divers types d’ « infractions » dans l’actuel « District administratif spécial de Hong Kong (DASHK) » chinois. Bien que, comme l’a laissé entendre de manière transparente le Ministère des Affaires étrangères chinois, il serait grand temps de se calmer. 26 ans se sont écoulés depuis le retour du DASHK dans le pays.

Les relations de la Chine avec les deux principaux pays de l’UE, notamment avec la France et l’Allemagne, semblent beaucoup plus positives. Bien que dans la politique étrangère de la direction de la seconde (dans laquelle il y a peut-être les éléments les plus anti-allemands de toute la période d’après-guerre), certaines tendances du plan pro-américain-anti-chinois sont également notées.

Néanmoins, la direction de la PRC n’abandonne pas les tentatives d’entretenir des relations avec la RFA aussi. Il convient de noter à cet égard la rencontre à Pékin fin mai du deuxième (après Xi Jinping) responsable de la politique extérieure de la RPC, Wang Yi, ainsi que du chef du ministère chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, avec le conseiller du chancelier de l’Allemagne, Jens Plötner. Dans le commentaire du Global Times sur les résultats des négociations, les mots suivants de l’hôte à la fin de celles-ci ressortent : « Nous attendons avec impatience le prochain cycle (septième consécutif) de consultations intergouvernementales entre les deux pays et travaillerons ensemble pour le préparer » On est d’accord que ce n’est pas du tout la « Déclaration des Six ».

Pour le moment, rien n’indique la possibilité de l’apparition d’une signature de la France sous celle-ci. Rappelons que  le récent voyage du président Emmanuel Macron en Chine a été positif en général. Début juin, le même Wang Yi a eu une conversation téléphonique avec le conseiller diplomatique de ce dernier, Emmanuel Bonn. Dans les commentaires de l’entretien, il est à noter surtout que les parties ont exprimé leur intention de développer des relations dans les deux formats  « RPC-France » aussi bien que « RPC-Europe ». De plus, il a été recommandé à les deux interlocuteurs  lors de ce dernier de « préserver l’unité, respecter l’indépendance et l’autonomie ».

Vu tout ce qui précède, notons enfin qu’il ne sera pas facile de respecter cette recommandation, et jusqu’à présent, les relations sino-européennes sont assez mosaïques.

 

Vladimir Terekhov, expert des problèmes de la région Asie-Pacifique, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook.« 

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