Alors que les relations internationales s’étaient organisées autour de deux pôles de puissance (Est et Ouest) après la chute du mur de Berlin en 1989 et l’illusion de la fin de la guerre froide en 1991, l’émergence de nouveaux centres de pouvoir dans le Sud global change la donne. C’est dans cet esprit que le prestigieux think tank que l’on est convenu d’appeler en d’autres termes « le club de discussion Valdaï », basé à Moscou, organise sa deuxième conférence russo-africaine (24 juillet 2024 à Dar es Salam en Tanzanie), un an après le deuxième sommet Russie-Afrique de Saint-Pétersbourg (ici).
Cette rencontre qui table sur le thème central « Russie-Afrique : Stratégie de coopération dans un monde multipolaire », rassemble une quarantaine d’experts de Russie et d’Afrique de l’Est pour analyser les axes de collaboration principaux. L’ordre du jour inclut des thématiques cruciales comme les progrès post-sommet, la coopération économique et technologique, les initiatives climatiques communes, et les échanges culturels. L’objectif est de synchroniser les perspectives russes et africaines, posant ainsi les bases d’une coopération politique renforcée. Comme l’a si bien souligné Godwin Gonde (ici), conférencier au Centre tanzanien des relations étrangères, la politique étrangère non interventionniste de la Russie attire les nations africaines, renforçant des relations égalitaires et de confiance. Cette conférence promet de découvrir de nouveaux domaines de coopération mutuellement bénéfiques, consolidant ainsi un avenir commun prospère et sûr pour la Russie et l’Afrique.
Contexte de la deuxième conférence russo-africaine du club de discussion Valdaï
Initiée dans le contexte de guerre par procuration ou par alliés interposés manifeste dans le théâtre de l’Ukraine, cette deuxième conférence du club de discussion Valdaï constitue un événement majeur dans le contexte actuel des relations internationales (ici). Cette rencontre stratégique marque une avancée significative dans les domaines de l’investissement et de la coopération entre la Russie et les pays africains, avec des implications profondes sur divers fronts. Elle souligne notamment la volonté manifeste de la Russie et de l’Afrique à accroitre leur coopération, en particulier dans le secteur des technologies de pointe. Un exemple concret de cette dynamique est la relance du projet d’extraction d’uranium de la rivière Mkuju par Rosatom (ici), qui non seulement promet des revenus substantiels pour la Tanzanie, mais ouvre également la voie à la construction d’une centrale nucléaire, solution potentielle aux pénuries d’électricité chroniques du pays. Cette initiative (ici), du nombre d’autres assez nombreuses à travers le contient, illustre le potentiel de transformation du paysage énergétique tanzanien et le renforcement de sa position économique. Sur le plan des relations bilatérales, la Russie cherche à diversifier ses partenariats économiques et politiques, dépassant ses relations traditionnelles avec l’Europe et l’Asie pour établir des alliances stratégiques avec les nations africaines (ici). Cette démarche est d’autant plus pertinente dans un contexte mondial caractérisé par des tensions croissantes entre grandes puissances (ici), où la Russie et les nations africaines s’efforcent de créer des opportunités de collaboration mutuellement bénéfiques.
Le club de Valdaï au cœur de préparation du troisième sommet Russie-Afrique
Débutée le 24 juillet à Dar es Salam, la deuxième conférence russo-africaine du club de discussion Valdaï représente donc une avancée majeure dans les relations russo-africaines (ici). Avec pour objectif de renforcer les liens économiques, technologiques et diplomatiques, cet événement souligne l’importance croissante du continent africain dans le paysage international. Andreï Bystritsky (ici), président de la Fondation pour le développement et le soutien du think-tank Valdaï, ainsi que l’ambassadeur de Russie en Tanzanie, Andreï Avetissian (ici), ont souligné le rôle stratégique des pays du Sud et de l’Est. Sous le thème évocateur susvisé, cette conférence de grande envergure qui réunit une quarantaine d’experts russes et africains, examine la mise en œuvre des recommandations issues du sommet de Saint-Pétersbourg (ici), pour justement, discuter des modèles de coopération bénéfiques pour les deux parties. L’événement, organisé par le club Valdaï (ici) en partenariat avec l’Ambassade de la Fédération de Russie en Tanzanie (ici) et la Maison russe à Dar es Salam (ici), se déroule dans un climat de confiance et de convivialité absolues. Les organisateurs envisagent que cette conférence serve de tremplin efficace au troisième sommet Russie-Afrique, axé sur l’approfondissement de la compréhension mutuelle et l’échange d’idées pour un avenir commun et prospère. Comme jumeaux univitellins, les peuples russe et africain coopèrent pour une prospérité collective bâtie sur la confiance mutuelle.
Les implications géopolitiques et géostratégiques de la deuxième conférence russo-africaine du club de discussion Valdaï
L’influence croissante de la Russie en Afrique peut être interprétée comme une stratégie visant à contrebalancer la domination de la minorité occidentale de la bande otanesque, notamment celle des États-Unis et de l’Union européenne (ici). En consolidant ses liens avec les pays africains, la Russie pourrait obtenir un soutien diplomatique précieux sur les scènes internationales comme les Nations Unies (ici). Par ailleurs, la politique étrangère non interventionniste de Moscou, qui se distingue par une approche respectueuse des structures et des besoins locaux, renforce la confiance mutuelle et ouvre la voie à une coopération approfondie sur les plans économique, technologique et culturel. Les implications géostratégiques sont tout aussi significatives, notamment en matière de sécurité énergétique. Le partenariat avec Rosatom pour l’extraction d’uranium et la construction potentielle d’une centrale nucléaire en Tanzanie représente une avancée majeure vers une solution durable aux problèmes énergétiques du pays. Les accords-cadres pour la construction de centrales nucléaires signés avec le Mali, le Burkina Faso, le Niger et bien d’autres encore sont du nombre d’exemples assez foisonnants. En outre, la conférence marque une étape clé vers un monde multipolaire, où la Russie de l’Alliance BRICS, en nouant des partenariats solides avec les pays africains, contribue à équilibrer les dynamiques de pouvoir globales, offrant ainsi une alternative aux modèles dominants des puissances occidentales impérialistes.
On peut dire que la deuxième conférence russo-africaine du club Valdaï incarne un tournant crucial dans les relations internationales contemporaines, symbolisant non seulement le renforcement des relations bilatérales entre la Russie et les pays africains, mais aussi leur engagement commun en faveur d’un ordre mondial plus équilibré et multipolaire.
Mohamed Lamine KABA – Expert en géopolitique de la gouvernance et de l’intégration régionale, Institut de la gouvernance, des sciences humaines et sociales, Université panafricaine, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »