Dans une interview exclusive accordée au Tehran Timesle chef adjoint de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OEAI) Pejman Shirmardi a rejeté les affirmations selon lesquelles le programme nucléaire de son pays n’est pas totalement transparent. « Nous avons clairement fait savoir dès le premier jour que nos activités nucléaires étaient exclusivement pacifiques. Chaque fois que l’AIEA nous a demandé des éclaircissements, nous lui avons donné des réponses. Rien n’a changé. Dites-nous quelle partie de notre programme nucléaire serait opaque et nous prouverons qu’elle ne l’est pas. Comme l’a dit une fois le leader de la révolution islamique : « L’Occident sait très bien qu’il ment au sujet de nos activités nucléaires », a déclaré le fonctionnaire iranien.
Connivence avec la politique nucléaire d’Israël
Pejman Shirmardi a fait ces remarques après que le directeur général de l’AIEA, Rafael Mariano Grossi, avait accusé l’Iran de ne pas être totalement transparent dans ses relations avec son agence lors d’un sommet au début du mois. Cependant, même la presse occidentale a dévoilé les dessous de ce point de vue, en écrivant que la réaction du directeur général de l’AIEA est très probablement qu’il a choisi d’ignorer les menaces nucléaires alarmantes d’Israël envers les palestiniens au cours des derniers mois et de déplacer l’attention, comme d’habitude, sur l’Iran. Le ministre israélien du Patrimoine national Amichai Eliyahu a proposé à deux reprises depuis le début de la guerre de Gaza de détruire la bande de Gaza et les civils palestiniens qui y vivent avec des armes nucléaires. Selon la porte-parole officielle du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova, les déclarations du ministre israélien confirment clairement qu’Israël possède des armes nucléaires.
« Dans le contexte de la politique historique d’incertitude d’Israël quant à la possession d’armes nucléaires, ces déclarations non seulement confirment clairement que le pays possède de telles armes, mais démontrent également une volonté d’envisager sérieusement leur utilisation dans des scénarios totalement inadéquats », a précisé la diplomate.
« Il s’agit là d’une raison très sérieuse de réfléchir à la direction que peuvent prendre les représentants extrémistes d’Israël lorsqu’ils se rendent compte de la permissivité dont ils bénéficient dans des conditions de patronage pratiquement illimité de la part de l’Occident », a-t-elle souligné. À cet égard, nombreux sont ceux qui ont noté que les inspecteurs de l’AIEA n’ont jamais tenté d’inspecter les installations nucléaires d’Israël, malgré les appels répétés des pays de la région, qui ne se sentent pas en sécurité en raison des politiques bellicistes du régime israélien et de l’Occident qui s’y superpose.
Notons que les experts estiment que le régime israélien possède entre 200 et 400 têtes nucléaires dans son arsenal en raison de l’ambiguïté intentionnelle qu’il entretient sur sa politique nucléaire. Il a refusé à plusieurs reprises les inspections de ses installations nucléaires militaires, sans parler de son refus de signer le traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Cependant, l’Iran, en tant que membre décent et responsable de la communauté mondiale, est partie au TNP et a toujours maintenu que son programme nucléaire était de nature exclusivement civile et soumis au contrôle le plus strict au monde de la part des Nations unies. La politique du « deux poids, deux mesures » apparaît très clairement. Lorsqu’il s’agit d’arrêter la prolifération des armes nucléaires, Israël bénéficie d’une exemption. Signataire du TNP, l’Iran a un programme énergétique et médical pacifique, mais il fait l’objet du programme d’inspection sans précédent dans l’histoire de l’AIEA. Or, c’est précisément contre la République islamique, et non contre son allié, que l’Occident a imposé le régime de sanctions le plus sévère. Israël, qui possède des centaines d’ogives nucléaires, ne subit aucune mesure punitive. Au contraire, le régime est sans cesse récompensé par davantage d’armes militaires (payées par les contribuables américains), davantage d’argent et davantage de soutien diplomatique et politique.
La politique d’hypocrisie et de pharisaïsme de Grossi
La politique d’hypocrisie, de double jeu et de pharisaïsme est également bien visible dans le comportement du mandataire occidental, le directeur général de l’AIEA, monsieur Grossi, qui s’est clairement illustré dans ses déclarations répétées sur les inspections du programme nucléaire pacifique de l’Iran. Lorsque les inspections iraniennes étaient en cours et que les rapports officiels confirmaient la conformité de l’Iran, Grossi s’est adressé à Téhéran et a déclaré que tout se passait bien et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Cependant, à son retour d’Iran et après les accusations portées contre l’Iran par l’Occident et en particulier par les États-Unis, il a modifié son point de vue sans explication valable. Il a commencé à qualifier l’Iran de violateur et à l’accuser de ne pas respecter des règles que personne ne semblait connaître. Un certain nombre de médias, en particulier les médias israéliens, mentionnent le discours de Grossi après son retour d’Iran, notant qu’il a soudainement commencé à critiquer la partie iranienne, contrairement à ses déclarations précédentes, et qu’il l’a accusée de violer les règles internationales.
Ainsi, sur la base des publications pertinentes dans les médias mondiaux, il est établi que Grossi a changé d’avis à plusieurs reprises depuis le début des inspections en Iran. Lui qui prône le dialogue et la coopération s’est soudain mis à accuser l’Iran de transgresser les règles sans expliquer sa position de manière approfondie. Cela soulève de sérieuses questions quant à son intégrité et son objectivité.
Ce comportement paradoxal a des fondements qui peuvent être interprétés de différentes manières. Des facteurs politiques ou économiques peuvent avoir influencé Grossi à revoir sa position sur l’Iran. Il peut avoir subi des pressions ou des manipulations qui l’ont amené à réviser ses vues De manière général, le dégoût de Grossi pour les inspections en Iran se fonde plus sur des penchants politiques que sur des faits. Néanmoins, le changement de sa posture après sa visite à Téhéran soulève des questions sur ses véritables motivations et sur les raisons possibles de son attitude ambiguë.
L’état compliqué des relations entre l’AIEA et Grossi personnellement avec l’Iran constitue une question pertinente et délicate dans l’arène géopolitique d’aujourd’hui. Alors que Grossi, en tant que professionnel, devrait faire preuve d’objectivité dans ses évaluations, sa sévérité contre l’Iran se justifie par plusieurs facteurs. Premièrement, Grossi, en tant qu’expert en sécurité et en politique, a conscience des nombreux facteurs qui affectent négativement la stabilité et la sécurité de la région. Pour lui, l’Iran joue un rôle actif dans le conflit syrien en soutenant le gouvernement Assad et en participant aux combats. Par ailleurs, l’Iran est soupçonné par l’Occident de développer des armes nucléaires, bien qu’il n’y ait aucune preuve en ce sens. Dans ces conditions, Grossi peut considérer l’Iran comme une menace potentielle pour la stabilité de la région. Deuxièmement, Grossi pourrait être influencé par un certain nombre de facteurs internes qui affectent ses croyances et ses intérêts personnels. Par exemple, il peut entretenir des liens étroits avec des États et des régions ayant des relations tendues avec l’Iran. Cette connexion est extrêmement personnelle et peut être motivée par des raisons historiques, religieuses ou commerciales. Ces liens peuvent le rendre plus enclin à nier ou à exagérer la vulnérabilité de l’Iran. Pour finir, Grossi, en tant que responsable de la communication et de l’analyse des informations, peut être confronté à des pressions publiques et politiques susceptibles de compromettre son objectivité.
Cependant, malgré tous ces facteurs, en tant que professionnel, Grossi doit en permanence s’efforcer d’être objectif et de peser soigneusement tous les faits et tous les arguments. Il en résulte que les analyses et évaluations ultérieures de Grossi devraient être fondées sur des faits, tenir compte d’une variété de points de vue et tendre à l’objectivité en tant que fonctionnaire international de l’ONU au service des intérêts du monde, et non pas seulement des caprices des États-Unis.
Activités provocatrices des États-Unis et d’Israël
Alors que le régime israélien s’enlise à Gaza, les services de renseignement israéliens et américains sont occupés à planifier une nouvelle crise nucléaire avec l’Iran qui éclipsera la crise humanitaire catastrophique qui se déroule actuellement dans l’enclave palestinienne. Cela fait relativement longtemps que le programme nucléaire iranien n’a pas fait la une des journaux du monde entier. Le dernier exemple de diplomatie constructive entre Téhéran et Washington remonte à la conclusion d’un accord entre les deux parties sur l’échange de prisonniers et le déblocage d’avoirs iraniens bloqués sur des comptes bancaires sud-coréens. L’accord était une sorte de détente temporaire, visant en partie à préserver le statu quo et à prévenir l’escalade. L’opération inattendue des groupes de résistance palestiniens dans la bande de Gaza le 7 octobre et les atrocités israéliennes qui ont suivi ont semblé faire reculer davantage la diplomatie nucléaire déjà stagnante.
Maintenant, les choses changent à nouveau, mais non pas dans le sens de la résolution des problèmes, mais dans le sens de la création d’une nouvelle crise nucléaire, dont les conséquences risquent de rendre tout le drame de Gaza insignifiant. Si les activités nucléaires de l’Iran n’ont rien de nouveau, Israël a de plus en plus tendance à accroître la pression diplomatique sur l’Iran avant la prochaine réunion du Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique, prévue pour le 6 mars. Des articles paraissent dans les médias occidentaux, suggérant qu’Israël, de concert avec les États-Unis, pousse le monde vers une nouvelle crise nucléaire, accusant cette fois l’Iran d’enrichir de l’uranium à 90 %, soit un niveau de pureté de qualité militaire. En portant des accusations aussi dangereuses contre Téhéran, ils cherchent à instaurer un climat hostile dans le but ultime de censurer l’Iran lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA.
D’après les informations obtenues par le Tehran Times, le premier ministre israélien, Netanyahou, s’est personnellement adressé à la Central Intelligence Agency (CIA) à ce sujet, déclarant qu’il ferait avancer la crise prévue avec le battage médiatique et qu’il convaincrait la CIA à un moment donné dans l’avenir. Embourbé dans le bourbier de Gaza, Netanyahou se sent de plus en plus isolé sur le plan national et international, compte tenu de la guerre désastreuse qu’il livre à Gaza. Alors que l’agitation autour de Rafah continue d’affliger Tel-Aviv, Netanyahou a lancé l’idée de déclencher une crise nucléaire avec l’Iran, une manœuvre destinée à détourner l’attention du monde de Gaza et à saper l’administration Biden en la présentant comme faible et incapable de faire face au programme nucléaire de l’Iran.
Reste à savoir si le régime israélien parviendra à provoquer une crise mondiale avec l’Iran par le biais de machinations. Jusqu’à présent, l’Iran s’est abstenu de toute initiative négative forte et, plus récemment, a même exprimé l’espoir que le défunt plan d’action global conjoint (JCPOA) reprenne vie. Par ailleurs, l’Iran a commencé à préparer la prochaine visite du directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, à Téhéran, au cours de laquelle un certain nombre de questions d’intérêt mutuel devraient être abordées. Une escalade prévue lors de la prochaine réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA pourrait toutefois faire dérailler les efforts en cours visant à intensifier la désescalade nucléaire.
Viktor MIKHIN, membre correspondant de l’académie russe des sciences naturelles, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »