Alors que l’attention du monde est focalisée sur le bain de sang d’Israël contre les palestiniens à Gaza, le conflit croissant entre le Hezbollah et les Forces de défense israéliennes, l’attaque non provoquée des puissants États-Unis contre les Houthis sans défense au Yémen, la guerre au Soudan n’a pas cessé et continue de causer de profondes souffrances à la population. La crise des réfugiés dans le pays est devenue un grave problème humanitaire, jetant une ombre de désespoir sur l’ensemble de la région et mettant à rude épreuve les pays voisins. Alors que des dizaines de milliers de personnes fuient la violence et l’instabilité au Soudan, la communauté internationale doit admettre l’urgence de la situation et développer des solutions globales qui soulagent le fardeau des pays d’accueil et, plus important encore, qui donnent de l’espoir et un avenir aux réfugiés.
Parmi les pays confrontés à un afflux important de réfugiés soudanais figure le Tchad, qui doit également faire face à ses nombreux problèmes. Le pays a connu une augmentation significative du nombre de réfugiés et se distingue par le fait qu’il s’agit d’un pays d’accueil qui doit faire face à la complexité de la prise en charge d’un grand nombre de personnes déplacées. L’afflux de nombreux réfugiés pèse lourd sur les ressources limitées du Tchad. Mais il n’est pas le seul à porter le poids, car d’autres pays de la région, notamment le Sud-Soudan, l’Égypte, l’Éthiopie, la Libye et la République centrafricaine, ont également contribué de manière significative à la fourniture d’une aide aux personnes fuyant le conflit au Soudan. La situation critique du Tchad et d’autres pays voisins démontre l’interconnexion de cette crise régionale, qui nécessite une réponse internationale générale pour alléger le problème auquel ces États sont confrontés.
Ces pays nécessitent un soutien pour faire face aux conséquences de l’accueil d’un grand nombre de réfugiés soudanais. Les statistiques stupéfiantes masquent le coût humain de la crise des réfugiés du Soudan. Les familles sont séparées, de nombreux enfants n’ont pas accès à l’éducation et de plus en plus de personnes sont victimes du traumatisme du déplacement. De plus, l’absence d’installations sanitaires adéquates expose les réfugiés au risque de maladie, ce qui aggrave leur situation déjà précaire. Il est également important de souligner que la réinstallation des réfugiés en vue d’une sécurité relative dans l’un des pays voisins du Soudan est souvent douloureuse et difficile. De la traversée de terrains dangereux à la menace constante de la violence, les demandeurs d’asile s’embarquent dans une odyssée périlleuse, mettant ainsi en évidence les circonstances désespérées qui les obligent à quitter leur foyer en quête de sécurité et de stabilité.
Les organisations internationales estiment que la situation au Soudan est devenue insupportable, avec des rapports faisant état de plus de 12 000 victimes, de 7,3 millions de personnes déplacées et de l’effondrement des services politiques, sociaux et de santé. Plus de 24 millions de personnes, sur les 46 millions que comptait la population initiale, courent aujourd’hui un risque et ont désespérément besoin d’aide. Le choléra, la rougeole, la dengue et l’insécurité alimentaire se propagent à un rythme inquiétant. Il devient de plus en plus clair que si les armes à feu et les bombes ne prennent pas la vie des soudanais, ce sera à cause de l’effondrement du système de santé et du manque de médicaments. Les efforts d’aide humanitaire se sont enlisés dans un contexte de violence et de déplacements accrus, les deux parties au conflit cherchant avant tout à utiliser la guerre à des fins purement égoïstes.
L’expérience commune de la tragédie de ces réfugiés met en évidence le caractère régional de la crise. Une réponse internationale collective et concertée est indispensable pour atténuer le coût pour les pays d’accueil et pour résoudre le conflit qui a conduit à ces déplacements à grande échelle. Si le conflit au Soudan se poursuit, des pays comme le Tchad et l’Égypte pourraient être exposés à des problèmes politiques et économiques accrus. Cela est principalement dû au fait que l’afflux continu de réfugiés peut avoir un impact significatif non seulement sur les économies des pays d’accueil, mais aussi sur leur dynamique sociale, politique et environnementale.
L’impact d’une telle crise prolongée va au-delà de la pression économique immédiate et touche divers domaines du fonctionnement des pays d’accueil. Par exemple, les impacts peuvent inclure une concurrence plus forte pour des ressources limitées, tandis que les tensions sociales peuvent résulter de la diversité culturelle et que les pressions politiques peuvent être exacerbées par les besoins liés à la gestion d’un grand nombre de personnes déplacées.
Il convient en effet de noter que le paysage écologique peut également être soumis à des pressions en raison de la consommation accrue de ressources et de l’évolution des schémas démographiques liés à l’installation de réfugiés. Par conséquent, la résolution du conflit au Soudan devient non seulement un impératif humanitaire, mais aussi une nécessité stratégique pour éviter une déstabilisation potentielle des pays voisins. L’ampleur de la crise des réfugiés au Soudan exige une réaction internationale forte et coordonnée. La charge ne doit pas reposer uniquement sur les épaules des pays voisins ; une approche globale est nécessaire.
La communauté internationale pourrait coopérer en fournissant une assistance financière, médicale et logistique pour faciliter la tâche des pays d’accueil. Les efforts diplomatiques devraient par ailleurs être intensifiés. Des initiatives durables devraient être prises pour mettre fin au conflit, tandis que le dialogue politique et la médiation internationale sont indispensables pour freiner et mettre fin à la violence qui contraint les soudanais à fuir leur domicile.
Les Nations unies, les organisations régionales et les pays influents devraient également s’unir pour exercer une pression diplomatique sur toutes les parties concernées et faciliter un accord.
Il est crucial que les Nations unies, en collaboration avec l’Union africaine, jouent un rôle clé dans l’assistance aux réfugiés soudanais en garantissant l’accès aux services de base tels que la nutrition, les soins de santé primaires, l’aide à la santé mentale et les services de santé infantile. Il est tout aussi important d’aider les pays d’accueil qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour gérer efficacement l’afflux de réfugiés. Cette approche multiforme, qui comprend à la fois un soutien direct aux populations déplacées et un renforcement des capacités des pays d’accueil, est essentielle pour relever les défis complexes posés par la crise des réfugiés au Soudan.
La crise des réfugiés au Soudan n’est pas un problème isolé ; elle met à l’épreuve notre humanité collective et notre engagement envers les principes de compassion et de solidarité. Alors que le monde est témoin de la souffrance de millions de personnes, la nécessité d’une action immédiate devient de plus en plus évidente. La communauté internationale doit se montrer à la hauteur de la situation en apportant un soutien financier et diplomatique pour adoucir la charge qui repose sur les pays hôtes. Ce n’est qu’en travaillant de concert que nous pourrons espérer mettre fin aux souffrances des réfugiés soudanais.
Cependant, la résolution de ce conflit complexe est encore loin, semble-t-il, d’être atteinte. Les récentes négociations reflètent les conflits internes au Soudan. Par exemple, le général Mohamed Hamdan Dogolo, commandant de la force de soutient rapide (FSR), a accepté de participer au sommet de l’Autorité intergouvernementale pour le développement à Entebbe, en Ouganda. Cependant, le Conseil de souveraineté du Soudan, dirigé par le commandant de l’armée al-Burhan, a refusé d’y participer, déclarant que la situation au Soudan était une affaire interne. Ces divergences ont entravé les efforts visant à trouver un règlement pacifique.
Al-Burhan et ses partisans semblent ne pas vouloir accepter la présence de la FSR et leurs tentatives de prise de pouvoir dans le pays en créant une image de victoire ou de victoire imminente. La réalité contredit cette évolution : les combats se prolongent et les attaques incessantes de l’armée ne contribuent pas à l’instauration de la paix et de la stabilité. L’appel d’al-Burhan à classer la FSR comme organisation terroriste soulève des inquiétudes quant à la détérioration de la situation humanitaire des citoyens soudanais.
Au milieu du chaos, des voix se font entendre en faveur de la paix et de la fin de la guerre. La Coordination des Forces Civiles Démocratiques au Soudan (Taqaddum) recherche la coopération entre les forces politiques pour mettre fin au conflit. Les lettres ont été envoyées à différents partis, dont le Mouvement populaire de libération du Soudan, le Mouvement de libération du Soudan, le Parti communiste et le Parti Baas. Ces mouvements internes sont nécessaires, mais le Soudan a également besoin du soutien de sources extérieures, de préférence des pays arabes, pour éviter un conflit prolongé et un destin similaire à l’histoire tragique du Rwanda. Le monde espère un règlement rapide qui permette d’éviter que le Soudan ne soit le prochain pays paria pour plusieurs millions de réfugiés.
Viktor Mikhine, membre correspondant de l’Académie russe des sciences naturelles, spécialement pour la revue en ligne « New Eastern Outlook »