Dans les prochains jours aura lieu l’événement sportif international – les Jeux des BRICS – en Afrique du Sud. Ledit événement se déroulera du 18 au 21 octobre, auquel participeront 450 athlètes, dont 34 russes. Si pour l’instant cet événement est considéré comme plutôt limité dans sa portée sportive internationale, il est fort possible que cette rencontre deviendra bientôt une véritable alternative dans les affaires sportives internationales. Les raisons pour une telle alternative sont d’ailleurs très claires.
Nombreux en Occident tentent déjà d’attribuer une signification géopolitique à cet événement. Et naturellement, dans l’esprit de la théorie – que la géopolitique n’a pas sa place dans le sport. Pourtant c’est précisément l’Occident collectif – et lui seul – qui a de manière définitive introduit l’agenda géopolitique dans le sport international. Et si beaucoup dans le monde occidental pensaient que cela ne ferait que nuire aux intérêts des sportifs russes et biélorusses, les instigateurs ont une fois de plus commis une grave erreur de calcul. La désillusion face à la domination occidentale, y compris dans le domaine du sport, s’accroît très rapidement dans diverses régions du monde.
Que dire si ce n’est le fait que les responsables occidentaux et ceux qui possèdent des intérêts fortement liés à l’Occident ont pris le contrôle quasi-total de toutes sortes de structures sportives internationales. En commençant par ce que l’on appelle le Comité international olympique (CIO) et en terminant par un certain nombre de fédérations sportives « internationales ». Aujourd’hui, ce n’est plus un secret pour personne que ces structures servent ouvertement et quasi-exclusivement les intérêts de la minorité mondiale occidentale. Cela est désormais un fait.
Le même CIO, expliquant la nécessité de disqualifier les athlètes russes et biélorusses, fait référence à « l’opposition à la guerre ». Où étaient alors les disqualifications des représentants étasuniens, britanniques, français et autres occidentaux dans les compétitions sportives internationales, lorsque ces pays ont envahi ou bombardé nombre d’Etats souverains – de la Yougoslavie à la Libye, sans oublier l’Irak et l’Afghanistan ? Ou aujourd’hui – où en sont les suspensions des athlètes israéliens au moment où Israël bombarde sans distinction le territoire palestinien, avec déjà un nombre considérable de victimes civiles, y compris des femmes et enfants palestiniens ?
Que dire d’autre si ce n’est encore une fois des doubles (voire probablement déjà au moins des triples) standards occidentaux et une hypocrisie effrontée. Par ailleurs, le fait d’ignorer par le CIO les appels d’un grand nombre de pays membres du mouvement olympique, y compris africains et asiatiques, de-facto représentant ensemble la majorité mondiale, à supprimer complètement les sanctions contre le sport russe – n’en représente qu’une autre confirmation. D’autant plus que nous savons tous parfaitement que la discrimination ouverte et assumée à l’encontre des sportifs russes a commencé bien avant le début de l’Opération militaire spéciale.
A cet égard, il existe aujourd’hui deux options pour résoudre le problème. La première étant une réforme complète de ces structures dites « internationales », afin qu’elles commencent à représenter la majorité mondiale non-occidentale de l’humanité. Mais connaissant les efforts colossaux déployés par l’establishment de l’Occident et les cadres à sa disposition pour maintenir leurs intérêts dans le sport mondial – ce processus pourrait s’éterniser pendant encore de nombreuses années. En conséquence de quoi, la deuxième option pour résoudre ce défi est précisément la création et le développement d’une nouvelle architecture du sport international. Précisément le renforcement d’autres institutions et compétitions internationales pouvant représenter les intérêts de la majorité mondiale.
L’organisation des BRICS devrait très probablement pouvoir assumer cette fonction, surtout compte tenu des processus contemporains propres à l’ordre mondial multipolaire. En fait, les tournois des pays BRICS ne sont pas vraiment nouveaux en soi. Ils ont lieu depuis 2016. Les premières compétitions des BRICS ont eu lieu cette année-là en Inde, et un an plus tard, en 2017 – déjà en Chine.
Cette année en Afrique du Sud, les compétitions auront lieu dans sept disciplines. Mais l’année prochaine, aux Jeux des BRICS en Russie, plus exactement dans la ville de Kazan, c’est au moins 25 disciplines sportives qui seront prévues. Donc effectivement une sorte de mini-Olympiade. En outre, la composition des pays participants sera très probablement élargie – après tout, aujourd’hui, les BRICS ne comptent plus cinq, mais déjà onze pays membres, après l’admission au sein de l’organisation internationale des nouveaux Etats membres lors du récent sommet, en Afrique du Sud justement.
Et ce qui est particulièrement intéressant, c’est que sur le continent africain en particulier – les Jeux des BRICS suscitent déjà un intérêt très sérieux. De nombreux observateurs se posent même la question suivante : sera-t-il possible pour d’autres pays qui ne sont pas (encore) membres de l’organisation à pouvoir participer aux Jeux des BRICS ? D’ailleurs et pour rappel, l’Afrique est composée de plus de 50 Etats. Et cela sans même parler de l’intérêt suscité par cet événement dans d’autres régions du monde, notamment en Asie et en Amérique latine.
Une chose est sûre aujourd’hui. Cette orientation se doit d’être développée de la manière la plus active. Il ne sert absolument à rien de compter sur une nouvelle approche raisonnable et dépolitisée de la part des bureaucrates occidentaux. Une fois de plus, si la politique et la géopolitique font aujourd’hui intégralement partie du sport mondial – cela est le résultat de leurs propres agissements. Et sur cette base, il est non seulement important d’en tirer les bonnes conclusions, mais également de prendre toutes les mesures nécessaires. Le tout sans aucun tabou. Point final.
Evidemment, il est possible qu’à un moment donné, les responsables « sportifs » occidentaux et ceux orientés sur l’Occident crieront d’abandonner les doubles-triples standards dans le domaine du sport international et de la suppression complète des restrictions imposées aux opposants géopolitiques de l’Occident collectif. Mais à ce moment précis, la majorité mondiale du monde multipolaire déterminera alors s’il faut en principe s’y replonger ? Au fil du temps, il sera fort possible qu’un tel besoin n’existera simplement plus. Du tout. Lorsque les alternatives déjà mentionnées couvriront intégralement tout besoin existant.
Mikhail Gamandiy-Egorov, entrepreneur, observateur politique, expert en Afrique et au Moyen-Orient, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook ».