EN|FR|RU
Suivez-nouz sur:

Netanyahou provoque le déclenchement d’une guerre régionale

Nikolai Plotnikov, septembre 02

armée israélienne

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou continue d’entraîner son pays dans une guerre dont on ne voit pas la fin. Bien qu’il ait rasé la bande de Gaza et éliminé plusieurs dirigeants du Hamas et du Hezbollah, Israël n’est pas plus près de la victoire sur les fronts nord et sud.

Selon le New York Times, de hauts responsables américains ont admis que les Forces de défense israéliennes (FDI) avaient fait tout ce qu’elles pouvaient sur le plan militaire à Gaza, mais qu’elles n’avaient pas réussi à détruire le Hamas.

Détérioration soudaine de la situation à la frontière avec le Liban

Le 25 août, la situation à la frontière avec le Liban s’est brusquement détériorée. Plus de 100 avions de chasse de l’armée de l’air israélienne ont frappé à titre préventif des lanceurs du Hezbollah dans le sud du Liban. Les FDI ont également intercepté plusieurs dizaines de drones d’attaque se dirigeant vers le centre d’Israël. Auparavant, le Hezbollah avait tiré 250 roquettes et 20 drones sur le nord d’Israël en réponse à l’assassinat de son chef militaire Fuad Shukr.

Selon Reuters, les deux parties ont échangé des messages par l’intermédiaire de médiateurs afin de clarifier leurs positions et d’éviter une nouvelle escalade. La chaîne de télévision israélienne Channel 12 a confirmé que les dirigeants israéliens étaient optimistes quant à la possibilité d’une solution diplomatique à la crise. Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a déclaré que le groupe pourrait envisager de mettre fin aux hostilités actuelles. Moshe Ya’alon, ancien chef d’état-major de Tsahal qui a travaillé sous les ordres de Netanyahou, s’est dit convaincu que l’Iran et le Hezbollah n’avaient aucun intérêt à une escalade, et a ajouté qu’il ne pouvait pas en dire autant des dirigeants israéliens.

M. Netanyahou n’est toutefois pas satisfait de cette évolution. Il reste attaché à une solution exclusivement militaire au problème. De nombreuses personnes en Israël partagent sa vision messianique. Ils soutiennent les disciples de Zeev (Vladimir) Jabotinsky, l’idéologue des révisionnistes sionistes, dans leurs efforts pour réaliser ce qu’ils ont toujours voulu et promis: expulser les Palestiniens, comme ils le croient, de la terre d’Israël.

Israël met-il en œuvre le projet Nakba-2 ?

Apparemment, pour atteindre cet objectif, les sionistes militants (selon certains rapports, ils sont au moins 2 millions en Israël) ont l’intention d’imposer leur volonté aux États-Unis et de les entraîner dans une guerre régionale à grande échelle, s’ils sont empêchés de réaliser leur projet d’expulsion forcée des Palestiniens (faire Nakba-2) de la Cisjordanie.

Benjamin Netanyahou joue constamment et délibérément la carte de l’entraînement de l’Iran dans cette guerre. Sa première tentative a été de frapper la mission diplomatique de l’Iran à Damas et d’assassiner un général du Corps des gardiens de la révolution islamique. Elle a échoué. Les représailles de l’Iran ont été symboliques et n’ont pas causé beaucoup de dommages à Israël.

La deuxième tentative a été l’assassinat par défi d’Ismail Haniyeh, chef du politburo du HAMAS à Téhéran. Netanyahou s’attend à ce que si l’Iran réagit à l’assassinat de Haniyeh et riposte, les États-Unis soient contraints de défendre Israël et de frapper l’Iran.

Netanyahou, voyant que l’Iran marque une pause et ne cède pas à ses aventures, pourrait bien décider, sous un prétexte plausible, de prendre un autre pari – une frappe préventive sur l’Iran. Les calculs du Netanyahou sont les mêmes : les Américains ne pourront pas se tenir à l’écart en cas de riposte iranienne.

Si les États-Unis opposent leur veto à une attaque contre l’Iran avant les élections présidentielles afin que Kamala Harris ne perde pas, et que l’Iran ne riposte pas à la mort de Haniyeh, alors Netanyahou, pour expulser les Palestiniens, peut étendre les combats de Gaza à la Cisjordanie. Pour ce faire, il pourrait bien aller jusqu’à mener une provocation majeure dans la zone du Mont du Temple. Il pourrait par exemple mettre le feu à la mosquée Al-Aqsa pour inciter les Palestiniens à riposter. En même temps, il faut tenir compte du fait que les colons israéliens en Cisjordanie, qui représentent plus de 700 000 personnes, dont des dizaines de milliers de personnes ayant la citoyenneté américaine en plus de la citoyenneté israélienne, ont reçu une grande quantité d’armes légères sur les instructions du ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir.

Pour Netanyahou et son entourage radical de droite, plus la situation est mauvaise, mieux c’est. Les sionistes révisionnistes ont besoin d’une crise ou d’une confusion provoquée par la guerre pour réaliser pleinement leur projet Nakba-2. Cela permet notamment à Netanyahou de rester au pouvoir, même à ce prix.

En conséquence, les États-Unis sont piégés dans leur soutien militaire inconditionnel à Israël, et Netanyahou n’a plus beaucoup de temps pour entraîner l’Iran dans la guerre. Comme le souligne Yossi Werter, chroniqueur politique au Haaretz, au cours de l’année qui s’est écoulée depuis le 7 octobre 2023, Israël, sous la direction de M. Netanyahou, s’est retrouvé dans la pire situation stratégique de son histoire.

Quant à l’Iran et au Hezbollah, il semble qu’ils aient compris les intentions de Netanyahou. Il est peu probable que l’Iran respecte les règles de Netanyahou et qu’il l’affronte ouvertement. Selon un certain nombre d’indices, Téhéran a choisi la tactique de l’épuisement d’Israël.

 

Nikolay PLOTNIKOV, chef du Centre d’information scientifique et analytique, Institut d’études orientales de l’Académie russe des sciences, docteur en sciences politiques, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »

More on this topic
La politique américaine au Moyen-Orient n’a pas répondu aux attentes d’Israël
La crise du Proche-Orient peut déclencher une nouvelle et longue flambée
Les États-Unis n’acceptent pas la proposition de cessez-le-feu à Gaza
Le Soudan entre les griffes des « soldats de la paix » américains
Le Moyen-Orient: contre l’utilisation des bombes à sous-munitions et la mentalité de clan