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Moscou – Alger : en route vers le renforcement du partenariat

Yuriy Zinin, juin 29 2023

« Moscou et Alger plus proches que jamais », « Axe algéro-russe : nouvelles perspectives de coopération », « Sommet amical ». Ces par ces titres et d’autres similaires que les médias algériens reflètent la réaction à la visite d’État du président algérien Abdelmadjid Tebboune en Russie qui s’est tenue il y a quelques jours.

Au cours de la visite, une Déclaration de renforcement du partenariat stratégique entre la Fédération de Russie et la République populaire démocratique algérienne ainsi que 8 accords divers ont été signés. Les experts décrivent d’une seule voix ces relations mutuelles entre les deux pays comme « privilégiées ».

Elles sont nées à l’époque où l’Algérie luttait pour son indépendance vis-à-vis de la France dans les années 1950, époque à laquelle Moscou apporta un gros soutien, politique notamment.  Ensuite, durant les premières années d’indépendance de l’État algérien, l’URSS lui prêta main-forte, l’aidant à poser les bases industrielles de l’économie nationale : énergie, santé, sciences, défense, culture.

Avec l’aide de Moscou, aux quatre coins du pays africain des dizaines de sites industriels ont été édifiés, parmi lesquels cinq grandes universités techniques, devenues la forge des spécialistes locaux.

Les liens divers ont fait d’Alger l’un des partenaires les plus sollicités de Moscou sur le front de sa politique envers le Tiers-monde. Ils ont permis la diversification de notre activité commerciale extérieure, un débouché actif sur les marchés des équipements et des machines dans les pays d’Asie et d’Afrique.

Chaque époque a des accents particuliers, comme le montre l’Histoire. Aujourd’hui, le potentiel des deux Etats a augmenté de façon incommensurable.  Selon de nombreux experts algériens, il permet aujourd’hui aux deux partenaires de porter leurs relations éprouvées à un niveau supérieur et de meilleure qualité, compte tenu des exigences de l’ère moderne et des changements globaux dans le monde.

Il s’agit notamment d’élargir l’éventail des relations commerciales et d’atteindre de nouvelles frontières de la coopération économique. Les collègues russes ont été invités à la mise en oeuvre d’un certain nombre d’installations dans le secteur productif, à investir dans la pétrochimie, dans le complexe agricole, dans le système des banques privées du pays, à participer à la montée des petites et moyennes entreprises sur les « principes garantissant des avantages mutuels ».

Les médias locaux pointent directement le signal du président aux opérateurs économiques de la Fédération de Russie que son pays est ouvert et qu’ils peuvent compter sur le soutien du gouvernement dans leurs affaires. L’accord général des dirigeants des deux pays, qui rejettent la « politisation des relations économiques », a également été souligné.

L’intérêt de l’Algérie à rejoindre l’organisation des BRICS, exprimé lors de la visite, est d’actualité. Il est associé au désir du pays de renforcer son développement souverain, d’ouvrir de nouveaux marchés prometteurs, de diversifier sa structure et son économie afin de réduire sa dépendance vis-à-vis du secteur pétrolier et gazier.

Dans le même temps, les auteurs font appel à la puissance économique croissante du groupe BRICS, ainsi qu’aux liens de l’Algérie avec chacun des pays membres de cette Alliance.  L’Algérie cherche également des occasions de se tourner vers les monnaies locales, le rouble et le dinar, dans les règlements mutuels et de s’éloigner progressivement de la domination du dollar dans les règlements internationaux.

Le docteur et politologue algérien Belhoul, rédacteur en chef des revues « Defense and Geo-politik », considère la visite comme un suivi de la « boussole politique algéro-russe dans une direction qui contribuerait à la formation d’un ordre mondial multipolaire plus sûr et plus stable après la faillite du leadership individuel du monde».

Le quotidien algérien Al-Fajr estime que les deux pays « ont besoin l’un de l’autre » à une époque où le monde connaît des circonstances particulières depuis le début du conflit en Ukraine.

Depuis le début, l’Algérie n’a pas soutenu les sanctions occidentales contre la Russie et a continué de maintenir ses relations traditionnelles avec elle, notamment sur de nombreux sujets de politique étrangère, souligne l’organe jordanien Al-Majd. A présent, dans le cadre d’un partenariat approfondi entre l’Algérie et la Russie, on s’attend inévitablement à un plus grande entrelacement des relations et des intérêts, une plus grande coordination au niveau bilatéral et dans les espaces multilatéraux aux niveaux régional et mondial, ainsi qu’un plus grand dynamisme dans la mise en œuvre des programmes prévus, évoque une publication libanaise.

Ces faits ne sont vraiment pas du goût de tout le monde à travers le monde. L’existence même de l’Algérie récalcitrante, qui a rompu avec le diktat des colonialistes et de leurs sbires, puis a choisi sa voie de développement et ses partenaires, a constamment suscité et provoqué des explosions de mécontentement, ainsi que des tentatives de pression sur elle de la part de l’Occident.

Les analystes occidentaux tentent de discréditer le rapprochement russo-algérien, affirmant que le président Tebboune a ouvert de larges possibilités d’ « expansion russe » dans un espace géopolitique vital pour l’influence et les intérêts occidentaux, etc.

Ainsi, à la veille de sa visite à Moscou, 27 membres du Congrès américain ont envoyé une lettre au secrétaire d’État Anthony Blinken, exprimant leur inquiétude quant aux « relations de plus en plus étroites entre l’Algérie et la Russie » et appelant à des sanctions contre le gouvernement algérien en raison de « contrats d’armement d’un milliard de dollars conclus avec la Russie ».

En Algérie même, les attaques contre les politiques des autorités de la république ne semblent pas avoir suscité la surprise ou la crainte de la société. À en juger par les réseaux sociaux, les citoyens algériens ont suivi l’événement avec intérêt. Dans la rue et les cafés, il était au centre des conversations. Les gens n’ont pas caché leur fierté que la voix de leur pays ait été entendue et que la position ferme face aux pressions extérieures a montré qu’il était « fort et souverain », a résumé un quotidien algérien.

 

Iouri Zinine, chargé de recherche au Centre d’études sur le Moyen-Orient et l’Afrique du MGIMO, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outloook »

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