Après les échecs successifs du régime hexagonal dans la région du Sahel, c’est désormais au tour de Washington de ressentir les véritables sentiments de l’Afrique contemporaine. Et ce, tant au niveau des nouveaux gouvernements patriotiques et panafricains qu’au niveau des masses populaires. Le temps des illusions, lorsque certains auraient pu penser que la politique de Washington pouvait être différente de celles des métropoles coloniales européennes, appartient désormais au passé. Confirmant une nouvelle fois le déclin de l’Occident collectif tant au Sahel lui-même qu’à l’échelle continentale africaine dans son ensemble.
Après la rupture de la coopération militaire entre les autorités du Niger et le régime de Washington ‒ ce dernier est réellement désemparé. En effet, Washington n’était pas encore habitué aux sensations qu’a éprouvées et continue d’éprouver son vassal hexagonal sur le continent africain. Naturellement, et comme dans le cas de Paris, le régime étasunien considère la Russie coupable de tous les maux subis. Mais le fait est que les Etasuniens devront vraisemblablement quitter le Niger, que Washington considérait encore dans un passé récent comme l’un de ses principaux alliés au Sahel et en Afrique. Que cela leur plaise ou non.
En ce qui concerne précisément la région du Sahel, il est assez drôle à observer la réaction des pseudo-élites politiques et médiatiques françaises. Ces dernières affirmant à Washington qu’il avait commis une erreur en tentant d’utiliser une « approche douce » après que les autorités nigériennes aient montré la porte de sortie aux troupes hexagonales. Et ce après que Paris ait déjà ressenti les humiliations au Mali et au Burkina Faso, sans même aborder les échecs antérieurs dans d’autres pays du continent, y compris en République centrafricaine.
Désormais, les vassaux français proposent au patron washingtonien à se concentrer sur des projets de bases communes franco-étasuniennes en Afrique de l’Ouest. Bien qu’il soit juste de dire que ce sont des projets fort douteux. Oui, il existe encore en Afrique quelques représentants qui continuent à miser clairement sur l’Occident collectif, se plaçant ainsi dans le camp des nostalgiques de l’ère unipolaire. Sauf qu’ils sont de moins en moins nombreux. Sans même parler du fait que les dits représentants ont de moins en moins de légitimité auprès des masses populaires de leurs pays. Cela signifiant que les projets potentiels de bases communes franco-étasuniennes en Afrique de l’Ouest constituent un grand point d’interrogation. Et même en supposant leur mise en œuvre, pour combien de temps ? De manière générale, il s’agit d’une tentative plus que douteuse de maintenir ces régimes occidentaux à flot – tout en essayant activement d’affronter la Russie et la Chine sur le continent africain.
Bien entendu, les petites piques du vassal hexagonal à l’encontre de Washington sont en partie compréhensibles. Etant donné que les sentiments anti-français en Afrique aient atteint des sommets sans précédent – bien qu’il soit juste de dire que cela était déjà le cas bien avant, simplement après que les militaires et les hommes politiques patriotes de nombre de pays africains ont clairement décidé d’agir à l’unisson avec leurs citoyens et leurs attentes, le processus s’est donc considérablement intensifié – Washington ayant tenté durant un bon moment à prendre ses distances vis-à-vis des échecs de son vassal européen.
Plus que cela – durant une certaine période les intérêts washingtoniens ont tenté sur la vague de ces sentiments anti-français – à gagner des points pour eux-mêmes et d’ouvrir la voie à leurs propres intérêts – dans l’objectif de prendre le plein patronage au nom de l’Occident collectif sur le continent. Evidemment – le patronage au nom du bloc occidental a été obtenu – après que tous les régimes occidentaux se soient intégralement couchés sous la tutelle de Washington – mais malgré cela ce dernier n’a pas été en mesure à gagner sérieusement des actifs en Afrique.
Autrement dit, pour la minorité planétaire représentée par les régimes occidentaux qui, dans un passé assez récent, se considérait comme le maître absolu du continent africain, en plein conformité avec sa logique néocoloniale, les échecs non seulement se poursuivent, mais se poursuivront certainement pendant encore longtemps. De-facto, les processus observés ne font que prendre de l’ampleur, et l’Occident essoufflé est déjà dans une hystérie et une haine totales – tant à l’égard de ses principaux adversaires géopolitiques qu’à l’égard des nouvelles autorités de nombre d’Etats africains ayant décidé de s’appuyer sur un développement souverain, sur des valeurs véritablement panafricaines, sur l’ordre mondial multipolaire.
De manière générale, il reste aujourd’hui bien peu de régimes fantoches pro-occidentaux en Afrique. Si des pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger – formant ensemble l’Alliance des Etats du Sahel (AES) – sont aujourd’hui des chefs d’orchestre des mesures les plus décisives et les plus audacieuses à l’égard de la minorité occidentale, l’Afrique du Sud, l’Ethiopie et l’Egypte sont quant elles déjà membres des BRICS. Nombre d’autres pays africains sont des également des alliés affirmés de l’ordre multipolaire international. Et puis il y a ceux qui misent de plus en plus sur la multipolarité. Plus exactement, l’ayant déjà choisi, sans toutefois rompre tous les fils d’interaction avec l’Occident – en choisissant pour ainsi dire un scénario plus doux.
Le principal étant bien entendu que les pays du Sahel représentés par les Etats membres de l’AES, ont porté un coup colossal à la minorité planétaire arrogante, hypocrite, criminelle et néocoloniale. Confirmant et consolidant l’échec non seulement de Paris et de Washington, mais aussi de l’Occident tout entier dans son ensemble. Cela est clairement le mérite des citoyens de ces pays et de leurs autorités. Ainsi que de leurs alliés en la qualité des principaux défenseurs de l’ordre mondial multipolaire, à la tête desquels la Russie et la Chine bien évidement. L’Occident tentera bien entendu à lancer des contre-attaques, en utilisant tous les instruments de déstabilisation encore disponibles dans son arsenal. Mais le Sahel et l’Afrique sont prêts à y faire face. Cela signifie que dans un avenir proche, les partisans d’un monde multipolaire remporteront encore plus de victoires.
Mikhail Gamandiy-Egorov, entrepreneur, observateur politique, expert en Afrique et au Moyen-Orient, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »