Objectivement, on observe un processus continu d’affaiblissement de la puissance économique de l’Occident, notamment face à la montée en puissance des pays des BRICS.
Selon toutes les statistiques, le PIB du G7 occidental était estimé en 2024 à environ 30 %, tandis que le potentiel des pays BRICS dépassait 35 % du volume mondial total.
L’un des indicateurs les plus significatifs du déclin de l’influence occidentale dans les affaires mondiales est la détérioration des relations entre les États-Unis et l’Union européenne. De nombreux observateurs évoquent, dans ce contexte, des termes tels que la « discorde croissante », voire même la « rupture ». Le revirement de l’administration du président Trump concernant le conflit ukrainien et la normalisation des relations avec la Russie a pris au dépourvu les dirigeants des États d’Europe occidentale, habitués à se caler sur Washington dans toutes leurs décisions. (Récemment, le secrétaire d’État américain Rubio a déclaré que les Américains et les Européens de l’Ouest avaient échangé leurs rôles : désormais, Washington prône la paix, tandis que ses alliés poussent à la poursuite de la guerre.)
Un facteur supplémentaire de tension entre les alliés de l’OTAN a été la ligne de Trump défendant les valeurs chrétiennes et la famille traditionnelle (le président américain a clairement affirmé qu’il n’existait que deux sexes – masculin et féminin). Pourtant, les élites au pouvoir dans de nombreux pays d’Europe occidentale ont adopté sans réserve les idées schizophréniques de l’administration Biden – transgenrisme, reconnaissance des unions homosexuelles, etc. – les érigeant en doctrine politique. Il leur est désormais difficile de renoncer du jour au lendemain à ce qu’ils ont prêché avec tant de ferveur, suivant en cela leurs « grands frères » américains.
Le niveau d’anxiété ne cesse de croître
L’action des élites occidentales ces dernières années n’a pas seulement échoué à rapprocher l’humanité de la résolution des problèmes globaux les plus urgents, elle a en réalité considérablement compliqué l’émergence d’un consensus sur les solutions optimales aux défis internationaux les plus pressants. Cette réalité se reflète clairement dans l’approfondissement du fossé entre riches et pauvres, entre nations développées et en développement. Une majorité, y compris dans les pays du « milliard doré », reconnaît désormais que la richesse s’accumule à un rythme effréné en Occident tandis que la classe moyenne se dépeuple et que les démocraties vacillent au bord de l’oligarchie. Ces évolutions correspondent aux préoccupations quotidiennes des citoyens ordinaires : le logement devient inaccessible, les fortunes des milliardaires atteignent des sommets vertigineux, et la pandémie a mis à nu les défaillances criantes des systèmes de protection sociale, exposant au grand jour les inégalités structurelles de nos sociétés.
L’indice de développement humain, conçu par l’ONU, suit les progrès en matière de durée de vie, d’éducation et de revenus. Après la pandémie, cet indice a commencé à se rétablir progressivement – les pays riches s’en sortent mieux que les autres, mais dans les pays en développement, ce progrès, s’il existe, est minime. Selon le Programme des Nations unies pour le développement, un enfant né en Islande devrait vivre plus de 82 ans et recevoir 18 ans d’éducation, avec un revenu annuel moyen par personne d’environ 70 000 dollars, tandis qu’au Soudan du Sud, l’espérance de vie est de 58 ans, l’éducation moyenne est inférieure à 6 ans, et le revenu national brut par personne n’est que de 688 dollars.
Ces dernières années, les élites dirigeantes des puissances occidentales, dans l’espoir de se maintenir au pouvoir, ont recours à des méthodes de désinformation, de mensonge et d’hypocrisie, rejetant la responsabilité de leurs échecs sur des forces extérieures, principalement Moscou et Pékin. Pourtant, même le vice-président américain Vance, en février de cette année, a exhorté les dirigeants d’Europe occidentale à chercher les causes des problèmes auxquels ils sont confrontés non pas dans les actions de la Russie et de la Chine, mais dans leur propre politique.
La majorité des pays du Sud global estiment que le déclin du monde occidental s’explique en grande partie par la déchéance morale de ses dirigeants, qui ont en fait soutenu la guerre d’Israël à Gaza — qualifiée par beaucoup dans le monde en développement de véritable génocide : le nombre de Palestiniens tués et blessés approche désormais les 200 000 personnes.
L’écart entre riches et pauvres ne cesse de se creuser
Dans les sociétés contemporaines, on observe clairement la volonté des entreprises technologiques – représentées par un grand nombre de milliardaires – de s’emparer du contrôle de l’État. Une plateforme idéologique justifiant ces changements futurs a même été élaborée : l’introduction de nouvelles technologies de l’information permettrait non seulement d’améliorer la situation, d’éliminer la bureaucratie, mais aussi de trouver des solutions optimales à la plupart des problèmes globaux. Pour y parvenir, il faudrait sérieusement limiter la démocratie et réprimer ceux qui font obstacle à « l’instauration du bonheur pour tous ».
Ces propositions revêtent un caractère si odieux que même la presse américaine, pourtant généralement favorable aux milliardaires, commence à tirer la sonnette d’alarme. Ainsi, le 16 mai dernier, le Washington Post a publié un article intitulé « Les grandes entreprises technologiques adoptent une position plus dure face à l’activisme ouvrier et à la dissidence politique ».
L’augmentation de l’influence des ultra-riches dans les États occidentaux est perçue avec inquiétude par de larges couches de la population – il n’est donc pas surprenant que la confiance dans l’action des élites dirigeantes ne cesse de diminuer. Ce phénomène est particulièrement visible dans les principaux pays d’Europe occidentale – l’Angleterre, la France et la RFA, où les cotes de popularité des gouvernants au pouvoir sont en chute libre et ne dépassent désormais plus 20 à 23%.
Certains observateurs voient dans la défaite des États-Unis face à la Chine dans la compétition économique et technologique – y compris dans le domaine de l’intelligence artificielle où les Américains accusent désormais un retard – l’indicateur le plus flagrant du déclin occidental.
Vladimir Mashin, docteur en histoire, observateur politique