Des attentes immenses, mêlées d’une profonde inquiétude, entourent le retour stupéfiant de Donald Trump au pouvoir. Dès sa campagne et à la suite de sa victoire, la même question troublante refait surface : Trump tiendra-t-il ses promesses ou s’agit-il d’une nouvelle trahison des espoirs placés en lui ?
Beaucoup de ces personnalités manquent de l’expérience nécessaire pour occuper ces fonctions de haut niveau, sont idéologiquement biaisées ou tout simplement inadaptées pour gérer des dossiers aussi complexes. Une rébellion interne, en particulier dans les sphères de la Défense et du Renseignement, semble non seulement possible, mais probable.
Parmi ces figures controversées, Tulsi Gabbard se distingue. Vétéran de la guerre en Irak, elle a, à plusieurs reprises, accusé Trump d’être « l’esclave de l’Arabie saoudite, » exécutant les ordres de ses « maîtres » saoudiens, et de soutenir Al-Qaïda. Pourtant, ces quatre dernières années, elle s’est alignée sur le discours « America First » de Trump, justifiant son opposition au consensus bipartisan sur la politique étrangère.
Voici cinq raisons qui, selon moi, expliquent pourquoi Trump risque encore une fois de décevoir.
1. L’Enracinement Néoconservateur
Le discours de Trump contre les « faucons de guerre » est contredit par ses choix de cabinet, qui incluent des figures profondément liées aux politiques néoconservatrices. Les nominations de Mike Waltz, Pete Hegseth et Elise Stefanik signalent une continuité avec les politiques interventionnistes des administrations passées. Cette approche ignore les appels populaires à mettre fin aux « guerres sans fin » et à réorienter les ressources vers des priorités nationales si urgentes.
2. Un Historique de Promesses Non Tenues
Lors de son premier mandat, Trump avait promis de désengager les États-Unis des conflits étrangers. Pourtant, bien qu’il n’ait initié aucun conflit majeur, il a intensifié l’implication américaine, notamment en ordonnant l’assassinat du général iranien Qasem Soleimani et en maintenant l’occupation en Syrie. Ce bilan jette un doute sur sa capacité – ou sa volonté – à rompre avec la politique étrangère traditionnelle des États-Unis et le maintien de plus de 800 bases militaires américaines à travers le monde, pour un coût de presque mille milliards de dollars, des ressources pourtant cruciales pour faire face aux défis nationaux.
3. Des Priorités Redéfinies, Mais Pas de Rupture
Bien que l’administration Trump semble prête à réduire son soutien à l’Ukraine, cela ne marque pas la fin de l’interventionnisme américain. Les ressources sont redirigées vers des confrontations plus importantes avec la Chine et l’Iran.
Avant la victoire de Trump, Benjamin Netanyahu avait déjà entamé des démarches pour gagner la faveur du président dans sa vision d’un Grand Israël et son acharnement à affaiblir l’Iran, objectif qu’il ne peut atteindre sans le soutien américain. Les nominations récentes, y compris celle du nouvel ambassadeur américain en Israël, laissent penser que Trump est prêt à céder à cette agenda.
Cette redistribution des priorités ne représente qu’un ajustement superficiel, et non une véritable rupture avec la politique étrangère agressive des États-Unis.
4. La Continuité Systémique face au Leadership Individuel
La présence constante de figures néoconservatrices dans les administrations américaines successives révèle un problème systémique : l’impossibilité presque totale de s’affranchir de l’influence des puissants groupes d’intérêts et de l’inertie institutionnelle qui façonnent la politique étrangère des États-Unis. Ce système, mû par des intérêts profondément enracinés – entreprises de défense, think tanks, groupes de pression –, dépasse le contrôle d’un seul leader.
Les géants de l’industrie de la défense tels que Lockheed Martin, Raytheon et Boeing tirent profit des engagements militaires prolongés, renforçant leur influence par des contributions aux campagnes et un lobbying intense. Les institutions comme le Département de la Défense, le Département d’État et les agences de renseignement privilégient des stratégies interventionnistes, visant à préserver la domination globale des États-Unis.
La politique étrangère américaine se forge dans un écosystème étroitement lié, comprenant des institutions gouvernementales, des think tanks et des entreprises de défense, où les individus circulent fréquemment entre ces secteurs. Par exemple, Lloyd Austin, actuel secrétaire à la Défense sous l’administration Biden, a siégé auparavant au conseil d’administration de Raytheon avant sa nomination.
Les think tanks tels que le Center for Strategic and International Studies, le Center for a New American Security, l’Hudson Institute et l’Atlantic Council renforcent ces politiques en façonnant le discours public et en conseillant les décideurs d’une manière qui perpétue une politique étrangère agressive. Cet écosystème bipartisan profondément enraciné sape le récit de Trump en tant que perturbateur, en garantissant la continuité de la politique étrangère américaine, indépendamment des discours de campagne ou des résultats électoraux.
5. La Politique du Leurre : Promesses contre Réalité
La campagne de Trump a mobilisé le soutien populaire grâce à une rhétorique anti-guerre. Pourtant, ses actes révèlent une répétition des tactiques de « leurre et échange » observées lors de son premier mandat. Ce décalage entre promesses électorales et mise en œuvre des politiques risque d’aliéner les électeurs, déjà désillusionnés par des engagements non tenus.
Trump a souvent utilisé une rhétorique anti-interventionniste pour séduire son électorat, mais ses choix – notamment la nomination de personnalités trop favorables à l’interventionnisme ou « faucon » – montrent une fidélité aux intérêts spéciaux plutôt qu’à ceux du peuple.
Sur les questions environnementales, Trump ne fait même pas semblant : il s’aligne clairement avec l’industrie pétrolière, sans rien promettre pour lutter contre le changement climatique.
Dans mon prochain article, j’analyserai les intérêts stratégiques des États-Unis en matière de politique étrangère, notamment concernant l’Ukraine et la Chine, ainsi que le rôle que l’Europe joue dans ces priorités. Ces questions, en plus des enjeux liés à Israël/Gaza et à l’Iran, figurent au sommet du nouvel agenda des affaires étrangères.
Sous une deuxième administration Trump, l’approche des États-Unis vis-à-vis de l’Ukraine et de la Chine semble s’orienter vers des contrastes profonds, motivés non par une idéologie, mais par des intérêts stratégiques en constante évolution.
Ricardo Martins – Doctorat en sociologie, spécialisé dans les politiques, la politique européenne et mondiale et la géopolitique, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »