03.02.2024 Auteur: Vladimir Mashin

Une grave crise politique intérieure aux États-Unis

Une grave crise politique intérieure aux États-Unis

Cette crise est liée à la politique migratoire des États-Unis. De nombreux migrants traversent la frontière avec le Mexique. Rien qu’en novembre, environ 250 000 tentatives ont été faites pour franchir la frontière sud. La plupart des nouveaux arrivants demandent l’asile et sont libérés en Amérique, mais doivent attendre des années (jusqu’à 5-6 ans) pour qu’une décision soit prise sur leur demande. Plus de 3,1 millions de personnes ont franchi la frontière depuis que M. Biden est devenu président. Au moins 1,7 million d’entre elles sont arrivées sans être détectées ou ont dépassé la durée de validité de leur visa.

L’État du Texas est particulièrement touché par l’afflux de migrants illégaux. Il occupe une place particulière aux États-Unis : le deuxième en termes de territoire, le deuxième après la Californie en termes de population (30 millions d’habitants). C’est l’un des centres de l’agriculture américaine, des industries pétrolières, gazières et chimiques et des institutions financières.

En 1836, les Texans se sont séparés du Mexique et ont proclamé une république, qui a d’ailleurs été reconnue internationalement. Après la guerre américano-mexicaine de la fin des années 1940, le Texas a rejoint les États-Unis.

Ces derniers jours, la Garde nationale du Texas a érigé une clôture de barbelés près de la frontière avec le Mexique pour lutter contre l’immigration clandestine. L’administration américaine s’en est plainte auprès de la Cour suprême, qui a ordonné l’enlèvement de la clôture.

Les troupes de l’État ont bloqué l’accès aux patrouilles fédérales, qui ont été autorisées par un tribunal à couper les barbelés. Le gouverneur du Texas, Greg Abbott, a déclaré qu’il s’agissait d’une « invasion de migrants » et qu’il fallait prendre des mesures d’autodéfense. Il a souligné que le Texas poursuivrait sa propre politique parce que les autorités fédérales ne parvenaient pas à sécuriser la frontière. L’État prend ses propres mesures pour lutter contre l’immigration clandestine. Il a notamment adopté une loi permettant d’arrêter et d’emprisonner les personnes soupçonnées d’avoir franchi illégalement la frontière.

Les actions de M. Abbott ont été soutenues par les gouverneurs républicains de 25 États américains, qui ont publié une déclaration accusant le président Joe Biden de ne pas vouloir lutter contre l’immigration clandestine :

« Nous agissons ainsi en partie parce que l’administration Biden refuse d’appliquer les lois sur l’immigration déjà en place et autorise illégalement la libération conditionnelle massive, dans toute l’Amérique, de migrants qui sont entrés illégalement dans notre pays. Plusieurs gouverneurs ont commencé à envoyer leurs unités de garde nationale au Texas ».

Les actions de ces gouverneurs ont été vigoureusement soutenues par l’ancien président D. Trump.

Les médias texans expriment de plus en plus la thèse selon laquelle, puisque le gouvernement fédéral ne fait pas son travail et ne laisse pas les autres faire le leur, il vaut mieux redevenir indépendant. D’autant plus que l’économie du Texas équivaut à celle du Canada tout entier. Le gouvernement du Texas a utilisé son propre argent pour construire 60 kilomètres de barbelés. Et le lieutenant-gouverneur du Texas, Dan Patrick, a demandé à Joe Biden de « s’écarter du chemin ». Le président américain a demandé au Texas de cesser de squatter la frontière et, en réponse, le procureur de l’État du Texas a déclaré que M. Biden était de mèche avec les cartels de la drogue mexicains qui veulent une frontière transparente.

Un certain nombre d’observateurs américains notent qu’au cœur du problème se trouve la volonté de l’administration américaine d’allouer des dizaines de milliards de dollars à l’Ukraine au lieu d’améliorer sa propre frontière. La presse américaine a commencé à évoquer la possibilité d’une guerre civile.

La crise actuelle est intensifiée par la condamnation croissante des actions de Washington concernant le soutien de la Maison Blanche au massacre des Palestiniens commis par Israël. Dans ces circonstances, la décision de la Cour internationale de justice du 26 janvier 2024 sur la plainte de l’Afrique du Sud concernant la violation par Israël de la convention sur le génocide a jeté de l’huile sur le feu. Dans son arrêt, la Cour a ordonné à Israël de ne pas commettre d’actes de génocide et de ne pas permettre à quiconque de les commettre, de ne pas autoriser les appels publics au génocide et de punir les personnes responsables de tels appels, d’assurer immédiatement l’accès à l’aide humanitaire dans la bande de Gaza et la reprise des services publics.

Cet arrêt de la Cour internationale de justice a été perçu dans le monde entier non seulement comme une condamnation des actions du gouvernement d’Israël, mais aussi comme un coup porté à la politique des États-Unis, qui cautionne en fait la destruction de la population palestinienne. Il convient de noter que plusieurs membres démocrates du Congrès, c’est-à-dire des partisans officiels de M. Biden, lui ont envoyé, ainsi qu’au Government Accountability Office, une lettre concernant un audit des transferts d’armes des États-Unis vers Israël : « La poursuite des transferts d’armes à Israël constitue une violation flagrante du droit américain et international et sert à commettre des crimes de guerre ».

On sait qu’un certain nombre de fonctionnaires américains ont déjà quitté le gouvernement pour protester contre la dissimulation des actions militaires d’Israël à Gaza.

Le 26 janvier, un procès civil accusant le président américain Biden et d’autres hauts fonctionnaires américains d’être impliqués dans le « génocide israélien à Gaza » a débuté devant un tribunal fédéral de Californie : un certain nombre d’organisations de défense des droits de l’homme les poursuivent pour « ne pas avoir empêché le génocide en cours et la complicité du gouvernement israélien à cet égard ».

Dans le contexte actuel, la conclusion de certains journaux du Sud sur « l’échec politique » de l’actuelle administration américaine est compréhensible.

 

Vladimir MASHIN, candidat aux sciences historiques, observateur politique, notamment pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »

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