De nombreux observateurs estiment que l’événement le plus important pour les finances et l’économie des États-Unis a été la baisse début août 2023 de la notation obligataire du pays de AAA à AA+ par l’agence Fitch qui a d’ailleurs constaté « une détérioration continue des normes de gouvernance au cours des 20 dernières années » ajoutant que « les affrontements politiques répétés pour limiter la dette et les résolutions de dernière minute ont sapé la confiance dans la gestion fiscale ».
La même agence a déclassé 10 autres banques américaines quelques jours plus tard.
BLOOMBERG considère que la reprise de l’économie américaine s’annonce douloureuse, surtout compte tenu de la polarisation politique et de la confrontation géopolitique.
Le climat psychologique du pays laisse à désirer. Cela est lié à l’aggravation de la lutte politique interne et aux problèmes de la vie sociale.
Ces derniers temps, les ouvrages de Richard Hanania connaissent une popularité croissante ; c’est une étoile montante parmi les écrivains et les intellectuels conservateurs prêchant l’idée de la suprématie blanche, selon ses propres termes : « Nous avons besoin de plus de police, de prisons et de surveillance des Noirs ». Un groupe de milliardaires et de millionnaires de la Silicon Valley a prêté attention à Hanania et a hautement estimé ses ouvrages. Le but de ce soutien, selon Jamelle Boui, chroniqueur au journal américain The New York Times, est simple : « Si certains groupes sont destinés à être en bas de l’échelle, alors il n’y a pas de questions à se poser sur leurs privations, leur isolement et leur pauvreté. Il n’y a aucune question à se poser sur une société qui engendre les privations, l’isolement et la pauvreté. Et il n’y a rien à faire, parce qu’il n’y a rien à faire : ces gens sont tels qu’ils sont ». L’idée d’une hiérarchie raciale travaille à rendre naturel un large éventail d’inégalités.
Les désaccords entre les partis républicain et démocrate occupent une place croissante dans l’agenda intérieur américain.
Même les médias américains estiment que l’inculpation officielle de l’ex-président Donald Trump par la Cour Fédérale pour « complot en vue de frauder les États-Unis, complot contre les droits des citoyens, et opposition et tentative de s’opposer aux procédures officielles » est une étape cruciale dans la jurisprudence des États-Unis.
Trump a rejeté les accusations et a qualifié la situation de « jour très triste pour l’Amérique ». Il prétend que « Biden est devenu fou et c’est une catastrophe insensée qui conduit l’Amérique en enfer ».
Les sondages montrent que le soutien à l’inculpation de l’ex-président dépend de l’appartenance à tel ou tel parti : la majorité des démocrates sont d’accord, alors que la majorité absolue des républicains les rejette. C’est une autre illustration du clivage et des différends profonds dans la société américaine. Les journaux pro-démocrates accusent Trump de tous les péchés, soulignant qu’il a trahi l’Amérique.
Les républicains répondent à leur manière : ils ont initié la procédure de destitution de l’actuel président l’accusant de corruption et d’escroquerie, en plus, ils ont obtenu la nomination d’un procureur spécial pour enquêter sur l’affaire Hunter Biden. Cela risque de compliquer la vie du locataire de la Maison Blanche.
De nombreux observateurs estiment que la campagne présidentielle de 2024 pourrait devenir la plus controversée et la plus conflictuelle de l’histoire américaine.
Le journal Emirates Gulf News a noté à cet égard le 7 août que les accusations contre Trump n’avaient pas réduit sa popularité ; au contraire, elle grandit avec ses problèmes : entre-temps, si l’élection avait lieu aujourd’hui, les deux candidats, Trump et Biden, remporteraient 43 % des voix chacun.
Dans le contexte de cette polarisation croissante du pays, les problèmes internes s’aggravent.
Au cours de ces dernières années, la mortalité aux États-Unis augmente – parmi ces morts figurent des décès par désespoir – une crise sociale qui s’est emparée des hommes blancs d’âge moyen, mais il y a aussi la violence avec utilisation des armes à feu, des surdoses de drogue, la mortalité maternelle et la mortalité des mineurs. Aux alentours de 2000, selon le New York Times, environ 400 000 Américains mouraient chaque année, par rapport à 622 000 en 2019.
Selon la déclaration du gouvernement américain du 11 août, le nombre de personnes qui se sont suicidées avait atteint un record de 49 000 en 2022, en hausse de 2,6 % par rapport à l’année précédente.
En 2020, l’Union Européenne a signalé 5 800 décès par surdose pour une population de 440 millions, la même année, les États-Unis avec une population de 330 millions ont signalé environ 68 000 morts. Aux États-Unis, ce chiffre a augmenté jusqu’à 80 000 en 2021, et jusqu’à 107 000 en 2022.
Il y a aujourd’hui 22 fois plus d’homicides par armes à feu en Amérique que dans les pays de l’UE.
En 2021, le taux de mortalité dans les accidents de route a été 4 fois plus élevé aux États-Unis qu’en Allemagne. Selon l’Économiste, plus de 5 000 Américains sont morts dans des accidents du travail cette même année par rapport à 123 Britanniques ; les Américains ont près de deux fois plus de chances de mourir dans un incendie que les habitants de l’Europe Occidentale et ils sont plus de deux fois plus susceptibles de se noyer que les Néerlandais.
La frontière des États-Unis avec le Mexique dépasse 3 000 km, plusieurs millions d’immigrés s’y sont accumulés : l’absence d’une politique claire sur le problème de migration menace de devenir, selon les médias américains, la plus grande erreur de l’histoire du pays.
De plus en plus, l’usure des infrastructures en Amérique se fait sentir : les semaines sans catastrophes ferroviaires majeures sont rares. En plus des sujets sociaux brûlants qui suscitent des discussions violentes, comme par exemple l’interdiction des avortements, la presse américaine écrit de la chute du niveau d’instruction dans le pays. Selon le responsable de l’association américaine des bibliothèques, plus de 13 % de la population adulte ne sait ni lire ni écrire au-delà du niveau de la 3 e année, c’est-à-dire de celui d’un enfant de 8 ans.
Néanmoins, la censure sévit de plus en plus dans le pays : 1 606 publications sont contestées par les agences compétentes pour cause d’allégations raciales ou sexistes inacceptables.
La réponse de l’administration américaine à l’incendie d’Hawaï (près de 100 personnes sont mortes et plusieurs centaines ont été portées disparues), a été critiquée dans la presse pour ne pas accorder suffisamment d’attention à la réponse d’urgence, d’autant plus que des milliards de dollars continuent d’être déboursés pour aider l’Ukraine.
Dans le même temps, l’administration américaine ne ménage pas ses efforts pour accuser la Russie de violer les principes du droit international, notamment dans le cadre de la crise ukrainienne : le représentant officiel des États-Unis a déclaré que le président Biden avait donné des instructions pour recueillir des preuves de l’implication de la Russie dans des crimes de guerre.
L’hypocrisie de Washington sur ce sujet est si évidente que même le journal égyptien Al Ahram l’a notée. Il l’a écrit le 10 août dernier : au cours des 42 premiers jours de la guerre en Irak en 1991, les troupes américaines ont largué 88 000 tonnes de bombes et de missiles sur le pays, ce qui équivaut à 7 bombes nucléaires de la taille de celle que les États-Unis avaient larguée sur Hiroshima. Ils ont également tiré environ 6 000 charges à l’uranium appauvri. Les principales cibles de cette force destructrice ont été les objets civils destinés au maintien de la vie et de l’activité humaine : centrales électriques, réseaux électriques, stations d’épuration, centrales téléphoniques, usines de transformation alimentaire, installations d’irrigation, fermes d’élevage, garages de transports en commun, gares ferroviaires, ponts et autoroutes, puits de pétrole et raffineries, stations-service, usines pétrochimiques, usines de traitement des eaux usées, fabriques textiles, universités, collèges, hôpitaux, cliniques, mosquées, musées, monuments historiques, centres commerciaux, etc.
Plus de 20 000 bâtiments ont été détruits, sans parler de l’asile d’Amiriyah, où des centaines de civils, pour la plupart des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont été tués par « deux bombes intelligentes » américaines.
La duplicité de la politique américaine devient flagrante étant donné les problèmes intérieurs croissants aux États-Unis : toutes les tentatives de détourner l’attention de l’opinion publique avec des accusations mal fondées contre d’autres pays ne font qu’irriter le monde : la confiance en Washington chute rapidement.
Veniamin Popov, directeur du Centre pour le partenariat des civilisations à l’Institut d’État des relations internationales de Moscou du Ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire, chercheur en sciences historiques, pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »