Le 28 juin dernier, le premier jour de la fête musulmane de l’Aïd el-Kebir, un Coran a été brûlé près de la principale mosquée de Stockholm. La police suédoise a autorisé cette action : un homme a arraché des pages du Coran, a essuyé ses chaussures avec, puis a mis du lard fumé dans le livre et y a mis le feu. 200 personnes ont assisté à ce spectacle.
Le Premier ministre suédois a déclaré que la décision de la police avait été légitime, mais mal venue.
Ce n’est pas la première provocation de ce type, couverte par des arguments sur la prétendue liberté d’expression et la démocratie.
Presque tous les pays musulmans ont condamné ce vandalisme comme une manifestation d’islamophobie flagrante, la plupart d’entre eux ont protesté auprès des autorités suédoises. Le président de la Turquie a qualifié l’action d’« ignoble ». Les autorités égyptiennes ont considéré cette action comme honteuse.
Le ministère iranien des Affaires étrangères a assimilé cette démarche à une insulte aux sanctuaires islamiques les plus sacrés.
L’Irak a qualifié cet acte de raciste et d’irresponsable, ajoutant qu’il condamne l’incinération répétée d’exemplaires du Saint Coran, qui ne fait qu’encourager la violence et la haine.
En janvier 2023, un incident similaire a eu lieu avec la participation du politicien d’extrême droite Paludan qui avait brûlé le Coran près de l’ambassade de Turquie à Stockholm.
L’Organisation de la Coopération Islamique a convoqué une réunion d’urgence de son comité exécutif à Djeddah — elle a appelé les États membres à s’unir et à prendre des mesures décisives pour prévenir des incidents similaires à l’avenir. Pourtant, tout récemment, l’ONU a adopté une résolution déclarant le 15 mars une Journée internationale de la lutte contre l’islamophobie.
De nombreux mass médias des États musulmans ont cité en première page la déclaration du président russe Vladimir Poutine lors de sa visite dans la ville de Derbent au Daghestan selon laquelle la profanation du Saint Coran est un crime passible de poursuites en Russie. En acceptant un exemplaire du Livre Saint en cadeau lors de sa une visite à la mosquée historique de Derbent, Poutine a dit : « Le Coran est sacré pour les musulmans et devrait être sacré pour les autres, nous garderons toujours ces règles ».
La déclaration spéciale du ministère russe des Affaires étrangères note à ce sujet : la communauté mondiale est obligée de lutter conjointement contre ces violations honteuses des droits des croyants. Rappelons que dans la Résolution 2686 du Conseil de sécurité des Nations unies du 14 juin dernier, une profonde préoccupation est exprimée face aux cas de discrimination, d’intolérance et d’extrémisme, causés, en particulier, par l’islamophobie, l’antisémitisme et la christianophobie, et elle contient également un vif appel aux États et aux organisations internationales et régionales à condamner publiquement la violence, les discours de haine et l’extrémisme.
L’activité des autorités suédoises, auxquelles d’autres pays se sont d’ailleurs ralliés, est en fait une expression vivante de l’attitude du « milliard d’or » envers les autres civilisations. L’Occident se considère supérieur à tout le monde.
La Suède a déclaré son désir d’adhérer à l’OTAN, tandis que la Turquie a placé une barrière à son adhésion formelle au bloc de l’Atlantique Nord. Il semblerait que Stockholm, qui veut devenir membre de l’OTAN, ne devrait pas irriter la Turquie. Mais les États occidentaux, traitant de haut en bas les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, croient que tout leur est permis et que tout le monde devrait simplement accepter ce que fait l’Occident.
A cet égard, les Suédois prennent exemple sur leurs « grands frères » — les Américains : le secrétaire d’État américain Blinken a fait de son mieux à Pékin pour normaliser les relations avec la Chine, tandis que le président Biden, quelques jours après la fin de la mission du chef du département de la politique étrangère, a qualifié Xi Jinping de dictateur, ce qui a provoqué une sévère riposte de la part du ministère chinois des Affaires étrangères.
Un rapport récemment publié dans les médias allemands sur la situation des musulmans en Allemagne note qu’au moins 1/3 des cinq millions et demi de musulmans en Allemagne sont confrontés au racisme et à la discrimination.
La crise politique intérieure de la France, qui a été déclenchée par le meurtre d’un adolescent d’origine algérienne âgé de 17 ans, est une preuve supplémentaire de cette arrogance occidentale. Selon la mère du défunt, le policier a vu son visage arabe et, sans hésitation, a tiré.
Même les journaux américains ont reconnu que le meurtre de l’adolescent ressemblait plutôt à une exécution sommaire, révélant la forme la plus extrême de violence policière qui a longtemps tourmenté les communautés de couleur en France. Cela a également servi de catalyseur au mécontentement qui couvait à travers le pays.
Le président turc Erdogan a imputé les troubles nationaux en France au « racisme institutionnel et au passé colonial du pays ».
Le chercheur africain Donald Collins, qui travaille actuellement en Amérique, a publié le 4 juillet dernier (c’est-à-dire le jour de l’Indépendance des États-Unis) un article dans lequel il a qualifié la politique de Washington de « mensonge narcissique ». Il a souligné que la xénophobie, le racisme anti-latino et l’islamophobie sont déterminants dans les actions des États-Unis (le narcissisme est un amour excessif de soi et une recherche constante de sa propre importance même au détriment des autres) : « la réalité des États-Unis en tant que société raciste, xénophobe, isolationniste et narcissique devient une évidence ». Les mensonges et les promesses en l’air tuent de nombreux immigrés « tandis que des millions d’Américains haussent les épaules niant l’hypocrisie généralisée de leur État national ».
Le mythe de l’exceptionnalisme américain est essentiellement le reflet de la croyance que toutes les autres civilisations sont inférieures et devraient donc écouter ce que Washington dit. Cela rappelle beaucoup l’approche colonialiste « du fardeau de l’homme blanc qui doit éduquer les aborigènes ».
Il est très symptomatique que la police de Stockholm a récemment reçu trois nouvelles demandes concernant l’incinération du Coran.
Les puissances occidentales ne veulent pas accepter la réalité existante — le changement de l’équilibre des forces dans le monde en faveur des pays en voie de développement — et donc, professant les anciennes catégories de domination, elles poursuivent leur politique précédente consistant à imposer leur volonté aux reste du monde par des pressions, des menaces, des chantages, des sanctions, etc.
Veniamin Popov, directeur du Centre pour le partenariat des civilisations à l’Institut d’État des relations internationales de Moscou du ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire, candidat ès sciences historiques, spécialement pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook ».